Les archives du Choletais
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Rue de Pineau

Hier / Aujourd'hui

Type : Maison d'habitation et distillerie / Adresse : Rue de Pineau / Date de construction : 1866

Propriétaire : Jean-Joseph Moudoux, distillateur / Architecte : François Daviau

Photographie. Google Maps
Photographie. Google Maps

Depuis le XIXe siècle, la rue de Pineau est intimement liée à l'histoire familiale des Moudoux, brasseurs-distillateurs. L'entreprise familiale, située à l'angle de la rue de Pineau et de la rue de Mondement, perdure jusqu'à la fin de la Première Guerre mondiale. Plusieurs générations d'hommes se succèdent : ils fondent une modeste brasserie puis font prospérer une grande distillerie avant de tout perdre dans les fracas de l'Histoire.

Jean-Joseph Moudoux (1816-1897), marchand de vins en gros, et son épouse Louise Bertheau font construire, en 1866, sur un vaste terrain situé rue de Pineau, leur maison d'habitation et une distillerie. La fabrique Moudoux-Bertheau s'agrandit tout au long du XIXe siècle, notamment sous l'impulsion du fils Camille Moudoux (1845-1922) : en 1870, des dépendances, bureaux, magasins de vins, écurie et atelier de tonnelier ; une nouvelle maison en 1882 ; une cuisine, buanderie, des citernes et machines à vapeur en 1890 ; transformation des écuries en distillerie et construction de nouvelles écuries en 1893. Camille est le membre de la famille qui développe le plus l'entreprise familiale. Le produit phare est alors la liqueur de cerise "La Marquise d'Anjou". Grand notable de Cholet, il s'investit sur tous les fronts : industriel, propriétaire viticulteur, il est d'ailleurs décoré du Mérite agricole (après le passage du phylloxéra, à la fin du XIXe siècle, il importe des plants américains, monte une pépinière sur ses terres au Puy-Notre-Dame et distribue gratuitement, aux exploitants voisins touchés, les plants nécessaires à la reconstitution des vignes), il fait aussi partie du Comité des fêtes, de la Commission des hospices, de la Caisse d'Épargne, de l'Association du 29e Régiment de mobiles et il est également conseiller municipal au Puy-Notre-Dame... À son décès, la presse saluera "un grand homme de bien".

Camille Jules André Moudoux (1882-1923), le petit-fils, est celui qui va "perdre" l'entreprise. Deuxième fils de Camille père, plus jeune que son frère ainé Charles (1872-1911), il s'intéresse sans doute moins à l'entreprise familiale. En effet, Charles s'implique dans la gestion de l'entreprise dès le début du XXe siècle. Le jeune Camille, lui, est passionné de musique et à sa majorité, il fait le choix de se tourner vers l'Armée. En 1911, le décès brutal de son frère Charles change la donne et Camille, seul fils en vie, doit donc s'intéresser aux affaires de l'entreprise. À la veille de la Première Guerre mondiale, son père lui cède les rênes de la distillerie. En 1914, Camille fils s'associe avec un négociant en vins, Henri Laroche, puis lui cède, en 1920, ses parts de la distillerie. Camille et Henri, avant d'être associés, sont probablement amis. En effet, Camille est engagé volontaire au 77e Régiment d'infanterie de 1903 à 1906. Il est soldat musicien et, à la même époque, Henri, originaire du Loiret, est aussi soldat musicien au 77e. La suite de l'histoire est plus tragique : Camille, mobilisé en août 1914 dans un escadron du train des équipages, revient du front, blessé et atteint "d'une paraplégie presque complète". Gravement malade, il épouse une belle artiste lyrique, Angéline, qui se produit au café du Bosquet, en bas de la rue de Pineau, établissement fréquenté par les militaires du 77e. Il reconnaît aussi Léon, l'enfant qu'ils ont eu, dix ans plus tôt, dans le plus grand des secrets (Angéline fait ses couches à Rennes). Camille met en vente tous ses biens et quitte Cholet avec Angéline et Léon. Ils s'installent aux Sables d'Olonne, dans la villa "Fine-Champagne" située sur le remblais. Camille, dont l'état de santé s'est encore dégradé, décède en 1923.

En 1929, la distillerie Laroche, successeur Moudoux, fait faillite et passe aux mains de l'industriel Lafoy. Puis, en 1933, le terrain de l'entreprise est finalement vendu en lots à messieurs Delhumeau, Allereau, Maillard, Bouet et à la Ligue d'Hygiène Sociale.

Aujourd'hui, on peut encore découvrir, en passant dans la rue de Pineau, la maison d'habitation des Moudoux et les bureaux, devenus bâtiments du Secours Catholique, derniers témoins de cette saga familiale dans le monde de la liqueur.

Pour en savoir plus

Vous pouvez consulter, en salle de lecture des Archives, les dossiers d'architectes suivants : 

3J1605 - MOUDOUX-BERTHEAU.- Brasserie, fabrique de liqueurs, rue de Pineau, travaux, installation brasserie, magasin, bureau, servitude, creusement de puits et citerne : plan de situation (crayon), plans, coupes, détails, élévations, conventions, lettres. Architecte Daviau. 1864-1866

3J1807 - MOUDOUX-BERTHEAU.- Brasserie, fabrique de liqueurs, rue de Pineau, travaux : lettres, métrés, arrêté du Maire et convention pour le creusement d'une citerne. Architecte Bréheret. 1872-1874

3J2116 - MOUDOUX Camille.- Brasserie, rue de Pineau, travaux de ravalement et de restauration : plans, élévations de portail et cheminée, conventions entrepreneurs, métrés. Architecte Manville. 1898

3J645 - LAROCHE Henri- Distillerie de "La Marquise d'Anjou", rue de Pineau, estimation de la propriété : plan schématique ; prévision de la réparation à envisager : lettre commerciale à en-tête. Architecte Laurentin. 1929


3J645 - En-tête facture Laroche, successeur Moudoux, 1929. Coll. AMC
3J645 - En-tête facture Laroche, successeur Moudoux, 1929. Coll. AMC

Rue de Pineau, Cholet

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